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Certains lapins peuvent souffrir, de façon congénitale ou acquise, de malocclusion dentaire, uni ou bilatérale ; cela signifie que leurs dents ne s’usent pas correctement et poussent de façon anarchique, elles deviennent trop longues et gênent l’animal, ce qui entraîne de la douleur, une diminution de l’appétit et le tri des aliments ; de plus, le lapin ne peut plus manger ses caecotrophes, ce qui peut causer de sérieux troubles digestifs, ne parvient plus à se toiletter, peut souffrir d’abcès ou d’atteinte du canal lacrymal. La vie de l’animal peut parfois être mise en danger !

 

Les causes de malocclusion dentaire

 

• Elles peuvent être génétiques : les lapins ayant une petite mâchoire sont plus sujets aux malocclusions, de même que certaines races.

• Les causes peuvent aussi être alimentaires : les granulés ou les graines ne permettent pas d’obtenir une bonne usure des dents, et les mélanges favorisent le tri (donc potentiellement certaines carences en minéraux et vitamines). Il est primordial que le lapin use ses dents en consommant beaucoup de fibres : foin, herbe et végétaux.

• Un déficit en vitamine D peut entrainer une mauvaise fixation du calcium ; or comme les dents poussent en continu (et consomment beaucoup de calcium), la mâchoire peut se décalcifier et les dents pousser de travers. Il est donc important qu’un lapin soit un minimum exposé à la lumière naturelle (jardin, proximité d’une fenêtre...).

• Il existe enfin des causes traumatiques, suite à des chutes ou des chocs.

 

 

La dentition du lapin

 

Le lapin est un lagomorphe, et non un rongeur, mais il a en commun avec les rongeurs de posséder des dents à racines ouvertes et à croissance continue. Chez le lapin, ce sont toutes les dents qui poussent en continu.

Un lapin adulte possède 28 dents :

• En haut : 4 incisives (2 petites derrière les 2 grandes), 6 prémolaires et 6 molaires

• En bas : 2 incisives, 4 prémolaires, 6 molaires

Si l’on suspecte un problème de malocclusion, il est important de pouvoir examiner ses dents. Il est possible d’emballer le lapin dans une serviette pour faciliter sa contention, et on peut alors soulever les lèvres avec un abaisse-langue. Le vétérinaire utilisera un otoscope, et si le lapin est récalcitrant ou présente un abcès buccal par exemple, le praticien l’anesthésiera de façon à pouvoir mieux inspecter la bouche et éventuellement prendre des clichés radiographiques.

La malocclusion des incisives est la plus facile à déceler : les incisives inférieures poussent un peu plus vite que les incisives supérieures, et en cas de malocclusion, les incisives du bas peuvent blesser les gencives ou le palais. Dans ce cas, le moyen le plus simple pour remédier au problème de malocclusion est de couper les dents ; le vétérinaire emploiera souvent la pince (ou coupe-ongles) ; éventuellement, s’il est spécialisé, le disque coupant. La pince est le moyen le plus usité, mais cela présente de nombreux désavantages : c’est plus douloureux, les saignements sont fréquents (risques d’infection), il existe une possibilité de fracture dentaire ou mandibulaire, de dévitalisation, d’abcès.

De plus, on ne peut effectuer une coupe en biseau. La coupe doit être réalisée toutes les 4 à 6 semaines en moyenne, de façon à prévenir une malocclusion des molaires. Il faut d’ailleurs systématiquement vérifier les molaires, dont la malocclusion entraîne parfois celle des incisives. Dans les cas extrêmes, il est parfois préférable d’extraire toutes les incisives (y compris celles qui ne présentent pas de problèmes, sinon les dents qui n’auront pas d’autres dents en face pousseront de façon trop importante et rapide). Cela peut sembler radical, mais bien souvent, un lapin qui n’a plus de douleur ni d’infection retrouve l’appétit ; il s’adapte assez facilement à sa nouvelle condition, quitte à l’aider un peu en râpant ses légumes.

La malocclusion des molaires est plus souvent la conséquence d’une mauvaise alimentation, et apparaît vers l’âge de 3-4 ans. Il est beaucoup plus difficile d’inspecter les molaires et de surveiller leur pousse, et il faut donc se fier à des signes associés :

• Anorexie, perte d’appétit : la nourriture tombe de la bouche du lapin, modification des préférences alimentaires

• Grincements répétés des dents

• Constipation ou diminution de la taille des crottes

• Yeux qui pleurent ou nez qui coule (signe de la pousse d’une racine qui touche un canal lacrymal), ou œil exorbité (présence d’un abcès rétro orbitaire)

• Hypersalivation, menton mouillé

• Mauvaise haleine

• Protrusion de la langue

Tous ces signes doivent mettre la puce à l’oreille, et il est indispensable de consulter sans tarder le vétérinaire. S’il apparaît une malocclusion des molaires, l’animal sera anesthésié (anesthésie gazeuse), le vétérinaire coupera les pointes des dents, puis limera toute la surface, parfois jusque la gencive, pour que le temps de repousse soit le plus long possible. S’il y a des ulcères sur les joues, le lapin peut mettre quelques jours à retrouver l’appétit, il faudra peut-être le gaver. L’extraction des molaires est déconseillée, sauf si la vie du lapin est en danger immédiat.

 

Conclusion :

La dentition des lapins est à surveiller de très près, afin de prévenir, dans la mesure du possible, les problèmes liés à la malocclusion dentaire. Une alimentation riche en fibre est indispensable pour aider le lapin à user convenablement ses dents. N’hésitez pas à faire vérifier la bouche de votre animal régulièrement par le vétérinaire. En cas de problème majeur, une consultation chez un spécialiste en dentisterie ou en NAC sera peut-être nécessaire.

 

Rédigé par : Isabelle Mennecier - Docteur Vétérinaire

30/01/2017